Le procès de Fodé Cissé, ex-directeur général de la Caisse nationale de prévoyance sociale et des agents de l’Etat et de son informaticien, Fodé Sirikahata Bangoura, entre dans sa dernière phase. L’audience de ce 20 juillet s’est ouverte avec les réquisitions du ministère public et les plaidoiries des avocats. Le parquet spécial près la CRIEF demande au juge de condamner l’ancien  parton de la CNPSAE à cinq ans assortis de sursis.

Selon le substitut, Lazare Mamady Bauret, Fodé Cissé n’avait autre intention que d’empocher les 1, 277 milliards de francs guinéens incriminés :  » Ce montant n’est pas sorti de l’Agence de Nzérékoré, mais Fodé Cissé tombe sous le coût du commencement d’exécution. Il voulait prendre ce montant, l’utiliser à des fins personnelles…Pour nous, tous les actes qui concourent au détournement étaient posés. Il ne restait plus que de soustraire la somme et de l’empocher ». Il soutient que Fodé Cissé avait reconnu,  lors de son premier interrogatoire, le 29 avril dernier, avoir transféré l’argent à Nzérékoré pour « s’en accaparer ».

Le parquet spécial plaide de le retenir dans les liens de la culpabilité, pour « Tentative de détournement de deniers publics ». Pour la répression, Lazare Mamady Bauret requiert que Fodé soit condamné à 5 ans de prison,  assortis de sursis.

La relaxe pour Fodé Bangoura

Il a, en revanche, requis la relaxe pour l’informaticien :  » Renvoyez Fodé Sirikahata Bangoura à des fins de la poursuite pour délit non constitué à son égard. Il ne peut être logé dans la même enseigne que monsieur Fodé Cissé. On lui a dit de faire un travail, il s’est empressé de le faire. Par honnêteté, je me dois de dire qu’il n’a pas commis d’infraction. Nous ne disposons pas d’éléments qui nous poussent à demander une condamnation à son égard ».

L’avocat de l’Agent judiciaire de l’Etat qui est le plaignant dans cette affaire, se dit lui aussi, convaincu que Fodé Cissé cherchait à sortir l’argent  du circuit normal pour le détourner. « Y a-t-il eu détournement ou tentative de détournement? Pourquoi les fonds se trouvant dans le trésor à Conakry ont été déplacés? C’est à ces questions que la Cour devra répondre…Nous sommes convaincu qu’on ne peut pas déplacer un tel montant s’il n’y a pas une arrière-pensée. Sinon il pouvait attirer l’attention de sa hiérarchie, lui expliquer les raisons. L’intention du directeur était de détourner l’argent. Pour nous, la tentative de détournement est consommée… » Maître Justin Tambada Tolno demande à la Cour de condamner les deux prévenus au paiement d’un milliard de francs guinéens pour, dit-il, que  » les hauts cadres comprennent que la Guinée d’avant 5 septembre 2021 et celle d’après n’est pas la même. Qu’ils sachent que dès qu’ils touchent à l’argent public la CRIEF est là ».

La défense proteste

Pour la défense, il n’y a eu ni détournement ni tentative de détournement. Elle estime que Fodé Cissé est victime des cadres tapis à la CNPSAE, réfractaires aux réformes : « Il a mis en place des stratégies innovantes, notamment la digitalisation. Cela n’a pas plu à certains…La Cour doit éviter de condamner un innocent », remarque Me Emanuel Bamba. Un autre avocat de la défense de faire remarquer que le montant incriminé demeure encore dans les comptes du Trésor public : « Nous sommes en droit, pas en comptabilité. On ne peut pas détourner des fonds qui ne sont pas à sa disposition. Or monsieur Fodé Cissé ne disposait pas de cet argent, comment pouvait il le détourner? Le parquet spécial lui-même a avoué que l’argent n’est jamais sortis des comptes du Trésor public ». Les deux avocats demandent la relaxe pure et simple de leurs clients pour délit non constitué.

Le dossier est renvoyé au 27 juillet pour la délibération. Fodé Cissé et Fodé Sirikahata Bangoura sont traduits devant la CRIEF pour « Détournement de deniers publics et complicité ». Ils sont poursuivis, pour avoir déplacé vers Nzérékoré une liste de 1 178 pensionnés en mars 2022 et d’avoir détourné plus de 1, 277 milliards de francs guinéens, sous prétexte de vérification.

Yacine Diallo