L’une des meilleures unités de mesure de l’hypocrisie des gouvernants guinéens des dernières années, est leur attitude vis-à-vis des populations qui habitent la zone dite de “l’Axe”. Lorsque le RPG a été chassé de son siège dans la commune de Matam, il est venu l’installer sur la route « Leprince » parce que c’était un lieu sûr pour les opposants au régime d’alors. D’ailleurs le siège y est toujours sans préjudice. Lorsque la grève sociale a fait plier le régime du PUP en 2007, les leaders syndicaux et le premier ministre qui en a résulté faisaient leur bain de foule   Lorsque le CNDD a fait le coup d’État de 2008, sa première parade a été dans cette commune pour s’offrir une légitimité de fait. Le CNRD avec son “colis” a fait de même le 5 septembre 2021 et plusieurs fois par la suite dont les images sont brandies avec fierté pour sa communication de propagande.

En ces moments, nul ne faisait de distinction entre mineurs et majeurs encore moins les composantes ethniques de la foule. Certains négocient des postes et privilèges du pouvoir avec des arguments liés à cette zone. D’autres vont même jusqu’à payer des jeunes venus d’ailleurs pour les recevoir en cérémonie au sein des institutions publiques en leur attribuant une domiciliation sur “l’Axe”. Donc si c’est pour dérouler leurs agendas malsains, les jeunes de “l’Axe” sont les anges qu’il faut aller voir. Et lorsque ceux-ci décident de ne pas céder à la manipulation pour exprimer une opinion contraire, ils deviennent le diable qu’il faut combattre par la violence jusque dans leurs domiciles.

Et pourtant, autant ils ont le droit d’être d’accord et applaudir, autant ils doivent avoir le droit de ne pas être d’accord et l’exprimer. Ils sont comme ça parce qu’ils sont conscients et ne peuvent accepter aucune domination par l’arbitraire. L’histoire et les faits ont prouvé qu’ils ne sont ni pour ni contre qui que ce soit. Et leur combat est loin d’être communautaire. C’est une question de valeurs et de principes. Alors, cette stratégie de diabolisation et de caricature les concernant est l’une des plus grosses hypocrisies des dirigeants et leurs soutiens opportunistes. Heureusement que la stigmatisation de Soweto et Harlem n’ont pas empêché le triomphe de la vérité et la liberté. Ces jeunes ne sont ni parfaits ni irréprochables. Et ils ne le prétendent pas non plus. Et en dépit de tout, la violence est condamnable en tous lieux, en toutes circonstances, quelle que soit sa provenance. Mais il faut arrêter l’hypocrisie de solliciter leur accord quand ça vous arrange et réprimer leur désaccord quand ça ne vous arrange pas.

Aliou Bah