La France a voté, le mardi 19 décembre, une loi « immigration » dans un contexte où l’on assiste à une montée en puissance du phénomène de la migration irrégulière. Cette nouvelle loi est perçue comme un moyen de durcir l’émigration en France. Un durcissement qu’El Hadj Hamidou Kassé trouve « dangereux ». Cet avis, le conseiller du président Macky Sall le justifie par le fait que « l’interdépendance des nations est une réalité ». Et donc, « corser les conditions de séjour, exclure de certaines prestations sociales comme la santé ou ne pas les rendre automatiques, c’est justement s’exposer à des mouvements internes qui peuvent déstabiliser la société ». 

L’année 2023 a battu tous les records en matière d’émigration irrégulière. Ce phénomène touchant particulièrement les pays du Sud met à nu les écarts du libéralisme, d’après El Hadj Hamidou Kassé. « Il y a une contradiction incroyable. Autant on crie à la libre circulation des capitaux et des biens,  dans le même temps, on limite drastiquement la circulation des hommes et des femmes. C’est la contradiction même du libéralisme. Oui à la liberté de mouvement des capitaux, des produits, des marchandises, mais halte à la libre circulation des hommes ».

 Outre cette contradiction du système libéral, M. Kassé pointe du doigt la question des inégalités au sein des nations et entre elles pour toujours justifier ces vagues d’émigration qui, a-t-il tenu à rappeler, sont moins d’être nouvelles. Il précise : « L’émigration, elle est vieille comme le monde. Ce n’est pas un phénomène nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que nous assistons à de nouvelles formes, des formes moins assurées, des formes quasiment suicidaires. »

Étant un phénomène qui touche toute la planète, El Hadj Hamidou Kassé considère qu’il faut une synergie mondiale pour venir à bout de la problématique. « C’est la réflexion collective qui engage tous les acteurs qui peut aboutir à des solutions consensuelles, collectives qui peuvent nous permettre de sortir de ce fléau, de cette tragédie qu’est l’émigration clandestine. C’est très dangereux d’expliquer tout par l’économique et le social. La preuve, il y a beaucoup de reportages qui ont montré nettement que des enseignants, des menuisiers qui ont un certain niveau de revenu, des artisans de façon générale, des commerçants ont réuni plus de 10 millions de francs CFA pour tenter le Nicaragua et les routes mortelles pour aller en Europe. D’autres qui réunissent suffisamment d’argent pour laisser à leurs parents le loyer ou la dépense et qui s’en vont. Il y a quelque chose qui ne relève pas simplement de l’économique, qui ne relève pas simplement du social, mais qui relève d’un certain imaginaire que nous devons étudier. Si nous persistons à expliquer cela par uniquement le gain, nous encourageons les jeunes à partir et ça ce n’est pas responsable. Donc, journalistes, partis politiques, État, familles, confréries religieuses, éducateurs, enseignants, etc., nous devons tous prendre conscience du fait que nous sommes face à un phénomène que nous ne comprenons pas totalement ».

El Hadj Hamidou Kassé prône ainsi « une nouvelle  politique internationale de la migration qui en définit les modalités pour laisser les hommes et les femmes circuler librement, qui en définit de nouveaux instruments et qui également en définit de nouvelles législations ». Il exhorte aussi les États à se battre contre les inégalités. 

Absa Hane – Seneweb.com