Confrontés à une crise sans précédent, les Guinéens espéraient un report de la grève générale et illimitée projetée par les différentes centrales syndicales du pays. Jusque tard dans la nuit du 25 au 26 février, la bonne nouvelle était espérée, vu notamment l’implication des chefs religieux. Mais ces derniers n’ont pu faire fléchir le mouvement social. La raison n’est pas à chercher loin. Lors d’une précédente manifestation, le FNDC (Front national pour la défense de la constitution) avait accédé à la demande des chefs religieux. Reportant sa manifestation la veille du déclenchement de celle-ci. Après quoi, le CNRD n’avait pas trouvé mieux que de procéder à l’arrestation des leaders du mouvement. 

Cette situation a entamé sérieusement la crédibilité des chefs religieux de Guinée. Depuis, le mouvement social a le sentiment qu’ils roulent pour les autorités. D’où l’incapacité pour imams et prélats de calmer le jeu. Ce qui n’est pas honorable pour eux. 

Leur implication dans les négociations pour reporter, voire annuler la grève générale, a suscité une vague d’indignation sur la toile. On y déplore le fait que ceux qui devaient être neutres et impartiaux, donc arbitres entre les gouvernants et les gouvernés, ne se font entendre que lorsque le pouvoir est acculé. Tous fustigent leur silence face aux maux qui ont conduit au déclenchement de la grève déclenchée ce lundi 26 février. Des maux qui sont entre autres le brouillage des ondes, la restriction d’internet et l’arrestation arbitraire de journalistes. 

La déception des Guinéens devrait interpeler la conscience de ceux qui, à longueur de journées, prêchent la parole du Seigneur. Les musulmans disent qu’après un décès, les anges enregistrent ce qui se dit sur le défunt. Ils apprécient ses bonnes et mauvaises actions en fonction du jugement de ses semblables. Ces mêmes chefs religieux nous apprennent que si l’homme veut savoir ce qu’on dit derrière lui, qu’il se rappelle de ce qu’il fait. 

Ainsi, la vague d’indignation des citoyens guinéens face à ce qu’ils appellent les deux poids deux mesures de leurs chefs religieux est plutôt inquiétante pour ceux-ci. « Nos imams ne sont jamais du côté de la veuve et de l’orphelin », a asséné dans la foulée le célèbre écrivain guinéen, Tierno Monénembo. C’est tout dire.

Une sagesse persane ajoute : « Le meilleur des princes est celui qui fréquente le savant ; le pire des savants est celui qui fréquente les princes ». Allez savoir si, dans notre pays, ce sont les chefs qui courent derrière imams et prélats ou l’inverse. La main qui donne est toujours celle qui commande. 

Habib Yembering Diallo