Le 22 avril, l’Union des forces démocratique de Guinée a sommé des cadres (en bois) récemment dégommés d’aller passer le témoin à leurs successeurs. Les courriers, expédiés par voie d’huissier, risquent de rester lettre-morte et cachent mal la profondeur du fossé qui sépare les sortants de leur famille politique.    

L’idylle entre la direction nationale de l’UFDG et certains cadres (en bois) du parti, tombés en disgrâce, vire à l’inimitié. En réaction au tête-à-tête inattendu entre le Chef de la junte, Mamadi Doum-bouillant, Cellou Ta-Baldé et Maladho Diallo, mais également du rôle trouble de Joachim Baba Millimouno dans la rédaction du mémorandum controversé réclamant le remplacement de la Petite Cellule Dalein Diallo à la tête du parti, le coordinateur des fédérations de l’intérieur, celui de la Cellule com et le trésorier se sont vus révoqués de leurs postes respectifs. La rupture est désormais totale.

L’UFDG veut organiser une cérémonie de passation de sévices avec faste, le 29 avril prochain, entre débarqués et nouveaux promus. Mais la rupture est si profonde que tout contact direct semble coupé. Il a fallu faire recours aux sévices d’un huissier de justice pour signifier à Cellou Ta-Baldé, Maladho Diallo et Joachim Baba Millimouno qu’ils sont attendus au QG du parti pour passer le témoin. La démarche ulcère les destinataires des courriers.

Cérémonie sans objet

Le désormais ancien trésorier de l’UFDG y voit une volonté de les faire boire le calice jusqu’à la lie : « Un mois après la décision de nous remplacer, c’est un huissier qui me réveille pour me tendre un document. Alors que ces gens me connaissent, ils peuvent m’appeler. Je ne répondrai pas, parce qu’ils cherchent à m’humilier et à me coller des choses. Mais cela ne marchera pas. C’est au président du parti de me convoquer, pas un autre. »

Une passation de sévices inutile, renchérit Maladho Diallo : « Au lendemain de notre rencontre avec le Président de la transition, ils nous ont retirés de toutes les plateformes du parti. Ordre a été donné aux agents de nous interdire l’accès au QG et au siège. Ils ont changé les serrures de nos bureaux. Et au-delà de tout, mon absence ne bloque pas le circuit financier du parti. Le chéquier, la carte bancaire, le cachet sont avec eux, Que veulent-ils d’autres ? »

Maladho Diallo estime que l’UFDG avait plus à gagner en les écoutant que d’engager un bras de fer : « Ils auraient pu mettre en place une commission disciplinaire pour nous entendre autour de l’acte que nous avons posé. Mais ils ont préféré nous relever de nos fonctions sans avoir notre version des faits. » A ceux qui pensent qu’il a rejoint le navire-CNRD, l’ex-trésorier de l’UFDG est sans équivoque : « L’UFDG, c’est dans mes veines, s’il y a quelqu’un qui doit quitter ce parti, ce ne sera pas moi. »

Joachim entretient le flou

L’ex-coordinateur de la Cellule com de l’UFDG a aussi reçu « en mains propres » son invitation. Mais Joachim Baba Millimouno se donne encore le week-end pour se remettre de sa surprise et décider s’il participe ou non à la passation de service avec son successeur, Souleymane Souza Konaté. Comme ça, il aura certainement fini de faire la fête à Mamou, où on marchait pour la paix et surtout, pour Mamadi Doum-bouillant.

Selon des indiscrétions, Joachim était prêt à se rendre à la cérémonie, sans conditions. Il en aurait même discuté avec le secrétaire gênant, Aliou Condé. Cela devait se faire initialement le 24 avril. Mais les choses auraient capoté, après que l’UFDG a décidé de changer de démarche. Joachim se serait rétracté, estimant que son successeur est déjà en fonction. « Il a déjà réuni des journalistes, fait son discours. Il est entré en contact avec le pool des communicants. Qu’est-ce qui reste encore ? », aurait-il rétorqué aux responsables du parti.

Souza botte en touche

A l’UFDG, jamais une passation de sévices n’avait fait couler autant d’encre et de salive. Ce que le parti considérait comme une simple routine est en train de devenir une patate chaude que personne ne veut déguster. Souleymane Souza Konaté soutient que l’intervention de l’huissier de justice découle du refus des révoqués de répondre à l’invitation : « C’est après avoir tout fait, qu’on a décidé de faire intervenir l’huissier. On a tout fait pour qu’ils viennent. En vain. D’habitude, c’est une chose qui se fait loin des regards. »

Le nouveau coordinateur de la Cellule com de l’UFDG dément les allégations de Maladho Diallo selon lesquelles les serrures ont été changées. La porte UFDG semble toutefois fermée aux cadres dégommés. Celle du pouvoir leur est-il grandement ouverte ?  

Yacine Diallo