AMICALE SACREE POUR LE DEVELOPPEMENT DE DOO (ASADD)

A

Son Excellence Professeur Alpha CONDE
Président de la République Chef de l’Etat
Conakry

Monsieur le Président,

L’honneur nous échoit en vous écrivant la présente, attirant votre attention sur une situation pertinente qui perdure depuis plus de deux (2) siècles dans notre contrée : Doo, l’actuel Sankaran – Kouranko. Il s’agit du fait que l’administration centrale guinéenne s’est toujours éloignée des Dookas (les habitants de Doo) depuis l’arrestation du Grand Résistant Africain Almamy Samory TOURE le 29 Septembre 1898 à NGuélémou (CI) mettant fin ainsi à l’administration samorienne sur Doo. C’est le début de l’ère colonial. Tout un calvaire pour Doo.

Au temps de l’Empire Manding sous Soundiata KEITA, Doo était une vaste province du Manding, son Roi Thiè Fawoni CONDE était le puissant Ministre de la Défense de Soundiata KEITA.

Avec l’Empereur de Wassoulou Almamy Samory TOURE, Doo a été annexé par lui sans combat. Il n’y a pas eu d‘expédition des troupes samoriennes à Sankaran – Kouranko. Bien au contraire il y a eu des éminents chefs Sofas. Tels que Dalaoularè Mory CONDE de Douako, Gnankondé Mory CONDE, Rama Abdoulaye CONDE (tué au siège de Sikasso) et Maréndén Fodéba CONDE tous de Kansérérah pour ne citer que ceux-là.

Voilà Sankaran – Kouranko pendant l’ère précolonial.

Après la chute d’Almamy Samory TOURE, le colonialisme français pour asseoir son administration, balkanise purement et simplement Doo (Sankaran – Kouranko entre les villes: Kankan, Kouroussa, Kissidougou, Faranah, Kérouani et même Dabola. Le gros morceau symbolique est resté derrière le fleuve Djoliba communément appelé «Canton de Sankaran» dans Kouroussa. Ce qui fait que beaucoup de villages de SankaranKouranko sont loin des chefs-lieux des préfectures.

De Doo dont la Capitale historique est Dafolo, il ne reste que ce canton de Sankaran qui renferme de gros villages: Douako, Wassayah, Kinièro, Kanséréah, Nafadji etc. Dafolo capitale historique de Doorelève du district de Kanséréah (5.000 habitants) situé à 9 Km au bord du fleuve Maffou.

Monsieur le Président,

C’est ce canton de Sankaran dans Kouroussa dont nous voudrions vous parler pour mieux vous exposer les problèmes. Ainsi, nous estimons que vous seriez mieux édifié sur le cas des autres contrées de Doo.

Sankaran est effectivement victime d’un vide administratif au tour de lui. Approcher l’administration tout près du citoyen, les Sankarankas sont lésés, ils n’ont jamais bénéficié de cela ni en prestige ni en privilège.

Imaginez-vous ! La route nationale Kouroussa-Kissidougou qui traverse la contrée de Sankaran est longue de 208 Km. La plus longue route entre deux (2) préfectures en Guinée. Cette longue route est entrecoupée à 12 Km de Kouroussa par le fleuve Djoliba dont la traversée pose d’énormes problèmes. Pour nous de Sankaran, l’administration réelle s’arrête à 12 Km de chez nous. La préfecture de Kouroussa est longue de plus de 300 Km, elle est la plus longue préfecture de la Guinée. Une préfecture qui a plus que besoin d’un nouveau découpage administratif avec le grignotage des autres préfectures environnantes.

Le découpage administratif que Sankaran a connu date de 1957. Au cours duquel il a été segmenté en trois (3) arrondissements (sous-préfectures) : Banfèlè, Douako, Kinièro. La sous-préfecture plus proche de Kouroussa est Kinièro 55 Km, toujours derrière le fleuve Niger, la plus éloignée est Douako 131 Km.

Ces distances plus longues, sans parler de l’état vétuste des routes ont des répercussions très négatives sur la vie du citoyen de Sankaran.

Monsieur le Président,

Comme nous vous le disons tantôt cet enclavement administratif de Sankaran a des conséquences qui se font sentir sous des aspects qui sont entre autres :

-L’aspect administratif et politique : Avec souvent la pléthore de villages autour d’une sous-préfecture, des incompréhensions, mêmes des trouves graves peuvent naitre facilement. Tel a été le cas tout récemment à Banfèlè lors de l’installation des conseillers municipaux le 14 Octobre 2018. (Ci-jointe la note explicative et la réaction verbale des représentants des dix (10) districts de la sous-préfecture de Banfèlè devant Monsieur Bakary CAMARA envoyé du MATD à Nafadji le 22 Octobre 2018. Le président de l’Asadd était de la partie, il a pu recueillir les propos pour vous comme un message fort (un mémorandum) au pouvoir d’Alpha CONDE à travers son Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation).

– L’aspect Justice : A l’instar des autres villages de Sankaran, Kanséréah est à 103 Km de Kouroussa, comment un citoyen moyen blessé dans ses raisons puisse-t-il s’y rendre pour porter, surtout s’il n’y connait personne chez qui loger ? Exemple frappant : les gens qui ont été blessés lors des troubles à Banfèlè, sur une dizaine, un seul a pu payer son transport pour aller porter plainte à Kouroussa. Ils’agit de Porè Lamine CONDE (portable : 623 476 442) Kanséréah. Le reste des blessés attend le Jugement dernier d’Allah.

L’aspect Santé

Monsieur le Président,

Permettez-moi de m’élargir amplement sur cet aspect Santé. Car c’est très important et je suis Médecin Chirurgien Service Chirurgie Maternité à l’Hôpital préfectoral de Boffa. A Sankaran rien n’a presque changé. Le mauvais découpage administratif aggrave notoirement le dysfonctionnement du District Sanitaire en place. Sankaran est victime de cela. J’ai grandi à Sankaran, je suis entré à l’école en 1962 à Kanséréah. Jamais je n’ai vu une ambulance venir évacuer un malade dans notre village, à plus forte raison une parturiente en détresse. C’est dans les hamacs que l’on les transportait pour les évacuer à l’hôpital. Actuellement ce sont les taxis-motos qui transportent les parturientes, les accouchées, et autres malades grabataires vers les formations sanitaires. Parfois on attend les marchés hebdomadaires pour trouver des véhicules et évacuer les patients.

Pas d’ambulance pour Sankaran. Insécurité totale pour ses habitants (femmes en grossesse, parturientes, accouchées et autres malades grabataires). L’ambulance est remplacée par les taxis-motos. Ce qui fait que l’écrasante majorité des patients évacués vers les hôpitaux meurent à Sankaran.

Aussi je vois à Sankaran des jeunes femmes de moins de 30 ans à leur 10ème, 11ème grossesse. Il y en a qui en meurent. Tel l’exemple douloureux de cette jeune femme en travail d’accouchement plus hémorragie. Embarquée par les siens sur une moto pour le centre de santé de Banfèlè à 30 Km, elle accouche d’un mort-né en cours de route. Réembarquée sur la même moto pour retourner au village. J’ai assisté à sa mort. Je n’ai pas pu prendre la tension artérielle par le tensiomètre qui était sur moi. Elle a rendu l’âme. Finagbè KOUROUMA, 28 ans, 11ème parité, 6 enfants vivants. Après tout j’ai réalisé qu’il n’y a pas de PF (planning Familial) à Sankaran.

En Guinée la pyramide sanitaire ou le circuit du malade est le suivant : poste de santé (village) – centre de santé (sous-préfecture) – hôpital préfectoral (préfecture) – hôpital régional (région administrative) – CHU (Nation). A Sankaran, rares villages possèdent un poste de santé, ou s’il y en a c’est fermé par manque de personnel. Ce sont les agents charlatans et les marchands des pharmacies par terre qui font la loi au sein de la population malade.

Monsieur le Président,

Ceux qui vous accusent d’avoir donné la priorité à la Haute Guinée dans votre programme de développement se trompent lourdement. Ils n’ont qu’à se rendre dans les villages de Sankaran pour connaitre les réalités du terrain.

L’hôpital régional de Faranah qui est l’hôpital le plus proche de chez nous est à 65 Km du village de Kanséréah. Cet hôpital est défaillant à mon humble avis. Le 10 Octobre 2018, mon petit garçon de 2 ans 4 mois fait diarrhée, vomissements et corps chaud. Ma femme et moi l’amenons d’urgence à l’hôpital. Nous tombons sur un hôpital dans le noir. Il est 21 heures. Il y a le courant en ville, mais pas à l’hôpital régional de Faranah. Pourtant c’est le barrage hydro-électrique de Dabola qui alimente Faranah. C’était très curieux de notre part. Nous allons en Pédiatrie avec l’enfant, puis au laboratoire toujours dans le noir. Les deux (2) agents qui ont travaillé sur mon enfant sont des stagiaires. Ils ont travaillé avec la torche de leurs portables. Sans commentaire.

Monsieur le Président,

Je travaille à l’hôpital préfectoral de Boffa, en complément d’effectif depuis Avril 1991. Il n’y a pas de village dans les sept (7) sous-préfectures et dans la commune urbaine de Boffa où l’ambulance ne part pas transporter des parturientes, accouchées et autres malades. Des sommes faramineuses ont été débloquées pour cela. Mêmesi ces sommes sont impunément détournées par vos directeurs d’hôpitaux et caciques du Ministère de la Santé. Vous ne dites rien.

Je voudrais dire tout simplement que Boffa est plus dotée que Kouroussa dans le domaine de la Santé.

Monsieur le Président,

L’Amicale Sacrée pour le Développement de Doo – ASADD existe désormais. Vous pouvez compter sur nous. Elle est ouverte à toute personne qui partage ses idéaux. Elle a pour mission : faire connaitre les problèmes de Sankaran Kouranko aux gouvernants que vous êtes afin de trouver solution. Car ironie du sort, depuis l’indépendance Sankaran n’a jamais été défendu par qui que ce soit pour le rétablir dans les droits qui sont les siens. Ni sous la Révolution d’Ahmed Sékou TOURE, ni sous Général Lansana CONTE, ni sous Prof. Alpha CONDE qui est à sa huitième année de pouvoir. Même la nomination des hauts cadres de l’Etat Sankaran est peu considéré. Les tenants du pouvoir ont toujours été ailleurs depuis l’indépendance et non à Sankaran. Bref Sankaran est toujours dans son isolement administratif d’antan. Cela depuis le temps colonial.

Pourtant vous aviez promis de réparer ce tort à Sankaran. Qu’est-ce que vous avez fait de cette promesse ?

Décentraliser les Collectivités et déconcentrer l’administration à Sankaran n’est ni une faveur, ni un luxe. C’est un devoir sacré du pouvoir dans la politique de rapprocher l’administration plus près du citoyen et un droit pour Sankaran. Il a droit à un nouveau découpage administratif, l’ancien date de 1957. Si vous, vous ne le faites pas, sûrement d’autres le ferons après vous.

Doo (Sankaran Kouranko) a droit au moins de deux (2) nouvelles préfectures et de nouvelles sous-préfectures. Nous voudrions que vous vous impliquiez personnellement en faisant appel à vos spécialistes techniciens en la matière.

D’ici là nous vous suggérerions de conseiller à votre Ministre de la Santé de préconiser la construction des hôpitaux de relais (type Sinko dans Beyla) dans les gros villages de Sankaran avant que le nouveau découpage voit jour.

Nous sommes et restons à votre disposition, Monsieur le Président, pour toutes fins jugées utiles. Nous vous remercions de l’attention.

Kanséréah, le 22 Novembre 2018

P/L’Amicale Sacrée pour le Développement de Doo – ASADD
Le Président

 

Dr El Hadj Fanta Mady CONDE
Médecin Chirurgien Service Gynéco-Obstétrique
Portable
 : (+224) 669 455 120

Pièce jointe : Message au ministre