Le Symposium sur le constitutionnalisme en Guinée a débuté ce mardi 21 février dans un réceptif hôtelier de Conakry, pour prendre fin le lendemain mercredi. Il est placé sous la présidence du chef de la junte, Mamadi Doumbouya, permet de faire l’historique et de tirer les enseignements du constitutionnalisme guinéen depuis 1958. Plus de 200 personnes y prennent part : conseillers nationaux, experts guinéens et étrangers, partenaires techniques et financiers, membres du corps diplomatique et consulaire…

Une opportunité pour les membres du CNT d’acquérir des notions fondamentales afin de pouvoir proposer un projet de nouvelle Constitution. Pendant ces 48 heures, les débats et les panels porteront sur les termes de référence et les grandes thématiques ci-après: historique du constitutionnalisme guinéen; droits et libertés fondamentaux; inclusion des personnes marginalisées; organisation et équilibre des pouvoirs publics; organisation administrative et système juridictionnel; le système électoral et référendaire.

Vice-présidente de la Commission Constitution, lois organiques, administration publique et organisation judiciaire, Fingui Camara souligne que « ce Symposium sera suivi du débat d’orientation constitutionnelle. Le gouvernement et les forces vives de la nation vont examiner les défis auxquels est confrontée la Guinée. Ce qui permettra de réfléchir sur les réussites, les défis et les limites des Constitutions antérieures et de proposer la nouvelle voie à suivre, en renforçant l’adhésion des citoyens à la culture du respect des normes constitutionnelles pour un développement durable et l’émergence rapide du pays ».

Expertise internationale

Conformément aux missions du CNT, les conseillers vont évaluer les questions relatives au constitutionnalisme et à l’État de droit à travers les exposés des experts identifiés par l’IFES (International Foundation for Electoral Systems) et NDI (National Democratic Institute). Mountagha Sylla, représentant pays IFES, déclare : « En s’associant à cette initiative du CNT, IFES s’inscrit dans la mise en œuvre du projet d’accompagnement de la Constitution et les processus électoraux en Guinée ». « Une Constitution, étant le reflet de l’évolution de la société, ne peut en aucun cas être statique. Elle est appelée à évoluer selon les aspirations du peuple. Nous sommes en train de travailler avec les institutions de la République notamment le CNT et le MATD sur la réflexion, l’accompagnement et tout ce qui est réformes constitutionnelles, institutionnelles ».

Selon Mountagha Sylla, la Constitution doit certes prendre en compte des aspirations du peuple, « mais surtout tenir compte des normes et standards internationaux, qu’elles qu’en soient les attentes de la population. Ce projet vise à renforcer des constituants et d’amorcer un échange entre expertise nationale et internationale, avec les constitutionnalistes, des légalistes, des légistes et des praticiens de gestion des institutions ».

Introspection

Dans son discours inaugural, Dansa Kourouma, président du Conseil national de la transition explique que le Symposium est l’étape conceptuelle et académique du constituant qu’est le CNT. Il permet de recevoir de diverses sources l’éclairage nécessaire à la compréhension des règles, procédures et concepts inhérents ou indispensables à la rédaction d’une Constitution.

Le président du CNT, Dansa Kourouma

Il souligne que le débat d’orientation constitutionnel, « consécutif au Symposium, sera un moment privilégié de dialogue citoyen inclusif et d’échanges constructifs sur la consubstantialité ‘’République – Nation – Etat’’, gage d’unité nationale, de cohésion sociale et de renforcement du lien ombilical de chaque citoyenne et citoyen guinéens avec la patrie ». Pour lui, le Symposium permet de faire une introspection profonde, conformément aux dispositions de la Charte de la transition.

Évoquant le Coup d’Etat qui a renversé Alpha Condé le 5 septembre 2021, Dansa Kourouma prétend qu’il a eu la particularité d’arrêter « un désordre institutionnel et administratif sans précédent et le mérite de restituer au peuple guinéen sa liberté, sa dignité et de retrouver l’espoir volatilisé après le forcing constitutionnel de 2020 ». Pour éviter aux Guinéens de revivre une telle situation, le président du CNT a évoqué l’obligation morale, impérieuse et permanente de respecter les lois du pays : la transparence, l’alternance démocratique, l’exercice de toutes les libertés et la jouissance de tous les droits. « C’est pour cette raison impérative, que ce Symposium sera suivi de séances de débat d’orientation constitutionnelle, auquel participeront toutes les composantes de la nation. Celles-ci feront l’effort de trouver les mécanismes et règles constitutionnels permettant de rendre à notre pays son émancipation ».

Les promesses de Doumbouya

Présent à cette cérémonie inaugurale du Symposium sur le constitutionnalisme, le président de la Transition Mamadi Doumbouya a rappelé, dans son discours de circonstance, la nécessité de rédiger une Constitution adaptée aux réalités guinéennes. « Vous savez très bien qu’une Constitution mal ficelée nous amènera à reprendre la transition. Nos pays ont besoin de la quiétude, pas que de transition en permanence. Je voudrais qu’on puisse mettre en place une Constitution forte, adaptée à nos besoins. Comme nous l’avons dit le 5 septembre, elle ne doit pas être écrite sur mesure pour un parti politique ou une personne politique ».

Colonel Mamadi Doumbouya, le Président du CNRD et Dansa Kourouma, le président du CNT

Mamadi Doumbouya réitère que le CNRD ne fera pas partie de l’après-transition. « Ça, c’est clair ! C’est pourquoi nous demandons que les questions sur la Constitution puissent être mises à plat. Le CNT va réécrire la Constitution, mais c’est le peuple de Guinée qui l’adoptera ». Il promet : « Nous n’allons pas écrire une Constitution pour 110 ans. Nous allons faire une qui résistera au temps et pourra être utile à nos enfants. Elle ne sera pas faite sur mesure parce que nous ne ferons pas partie de la mesure. Il faut prendre en compte ce qui n’a pas marché de Yomou à Boulbinet, mettre à nu les problèmes et trouver des solutions adaptées à chacun d’eux. »

Le colonel met en garde contre le mimétisme. « Il s’agit de réfléchir sincèrement, entre nous et Dieu. La nouvelle Constitution doit être utile à nos enfants qui viendront et non à nous seulement, car nous allons tous passer. Ce qui restera et résistera au temps, c’est notre pays. Je vous exhorte à élaborer un outil qui pourra servir la République de Guinée ».

Abdoulaye Pellel Bah