Depuis l’accession d’Alpha Condé au pouvoir, la répression, ce mal endémique de la Guinée, a ressurgi avec une virulence qui rappelle les années noires, celles des pendaisons publiques et du Camp Boiro. On attendait de celui qui passe pour « le premier président démocratiquement élu de la Guinée » qu’il nous fasse oublier le fouet de Lansana Conté et la terreur de Sékou Touré. On attendait de l’ancien prisonnier politique la réhabilitation des Droits de l’Homme, assortie d’un respect scrupuleux de la vie humaine. Par ses paroles comme par ses actes, il se situe hélas aux antipodes de toute valeur juridique et morale.
De Décembre 2010, date de sa première élection, à aujourd’hui, les organisations des Droits de l’Homme dénombrent 260 morts et 2 000 blessés. Ces chiffres ne concernent que les personnes fauchées à balles réelles dans les manifestations de rue. Ils seraient deux fois plus élevés si l’on y ajoutait les détenus victimes de leurs conditions de détentions et les dizaines de personnes qui ont succombé aux massacres de Womé, Zogota et Galapaye.
Ces derniers mois ont été particulièrement sanglants. Sortis massivement pour faire barrage à la modification de la constitution lui permettant de briguer un troisième mandat, les Guinéens ont dû affronter non plus seulement les balles des gendarmes et des policiers mais aussi celles des soldats que le régime, pris de panique, a réquisitionnés pour aider au rétablissement de l’ordre. 60 morts, rien que d’Octobre à Janvier ! Parallèlement, plus de 400 personnes ont été arrêtées pour les raisons les plus fallacieuses : fabrication et stockage d’armes de guerre, assassinats, complicité d’assassinats, insurrection, complicité d’insurrection, atteinte aux intérêts supérieurs de la nation etc.
Cette vague d’arrestation n’a épargné aucun quartier, aucune classe d’âge, aucune catégorie sociale. Voilà maintenant six mois que ces 400 personnes végètent à la Maison Centrale de Coronthie sans jugement. On y trouve des hommes politiques, des journalistes, des cadres de haut niveau mais aussi des anonymes (des familles entières parfois) cueillis nuitamment chez eux alors qu’ils dînaient ou dormaient du sommeil du juste. Mais le cynisme d’Alpha Condé ne s’arrête pas là : 150 mineurs font partie du lot. A ce jour, 20 d’entre eux ont bénéficié d’une libération conditionnelle, les autres ont été déférés devant le tribunal militaire qui en Guinée sert de siège au tribunal pour enfants.
Cette série de violences vise un objectif clair : intimider le peuple mais aussi et surtout, réduire au silence les opposants les plus irréductibles :
- Oumar Sylla dit Foyinké Mengué, resoonsable de la mobilisation et des antennes du FNDC (qui se retrouve pour la troisième fois derrière les barreaux).
- Ousmane Gaoual Diallo, ancien député, directeur de la communication du parti d’opposition, UFDG
- Malick Condé, maire-adjoint de Matam
- Chérif Bah, ancien gouverneur de la Banque Centrale
- Etienne Soropogui, leader du mouvement « Nos valeurs communes »
- Cellou Baldé, ancien député
- Abdoulaye Bah, ancien maire de Kindia
- Mamadi Condé dit Madic 100 frontières, militant de l’UFDG.
- Souleymane Condé président de la section FNDC de Boston (USA)
- Amadou Diouldé Diallo, journaliste, historien
Détenus arbitrairement et dans des conditions inhumaines (certains sont gravement malades, d’autres même, atteints de Coronavirus), ces martyrs ne doivent pas être oubliés. J’appelle toutes les consciences, tous les démocrates épris de justice et de liberté en Afrique et ailleurs dans le monde, à signer cette pétition pour demander la libération immédiate et sans condition de tous les prisonniers politiques en Guinée.
Fait à Conakry le 25 Avril 2021.
Tierno Monénembo, écrivain Guinéen