La prison civile et le tribunal de Coyah ont enregistré une succession d’attaques armées, occasionnant l’évasion de prisonniers, la disparition de dossiers et d’argent. Des actions visiblement coordonnées et préméditées, qui auraient pour mobile la libération d’un trafiquant de drogue bien connu de la justice.
L’insécurité bat son plein à Coyah. Dans la nuit du vendredi 23 juin, des individus lourdement armés ont attaqué la maison d’arrêt et de correction de cette ville située à 50 km, à l’est de Conakry. S’en est suivi une évasion spectaculaire au cours de laquelle 81 taulards se sont fait la malle. La nuit suivante, le Tribunal de première instance a été cambriolé à son tour. Des dossiers, qui étaient dans les bureaux du juge d’instruction et du greffier en chef, auraient été emportés par les assaillants.
Des attaques que le procureur Almamy Sékou Camara a qualifiées de « velléité d’intimidation et de déstabilisation contre le parquet de Coyah ». Il promet de traquer les malfaiteurs. Sur FIM FM, il révèle que ces derniers étaient habillés en treillis militaire, cagoulés et repartis en trois sous-groupes : la première guette, le deuxième couvre pendant que le troisième groupe mène l’assaut. Ils se seraient servis du même mode opératoire pour attaquer le tribunal, alors que les esprits étaient braqués sur la prison.
Évasion d’un bandit de grand chemin
« Le but était de libérer leurs amis détenus pour diverses infractions », pense le procureur Almamy Sékou Camara. Parmi les évadés, Mohamed Camara alias Agbakassié. Un « bandit de grand-chemin », détenu pour trafic de drogue, vol à main armée. Selon toujours le procureur de la République, il avait été interpellé dans la sous-préfecture de Wonkifong, porteur de deux PMAK et d’un fusil calibre 12. « Il fait objet d’enquête. Il est vrai que c’est derrière ce monsieur que les assaillants sont venus, avec d’autres complices. Ils ont réussi à le faire fuir. C’est un bandit connu de tous, qui avait été jugé et condamné à 20 ans de prison ferme par le tribunal de N’zérékoré, avant d’être libéré on ne sait comment ».
Les services de sécurité ont rattrapé 13 des 81 évadés. Les 200 autres prisonniers restés ont été éparpillés entre Conakry, Fria, Kindia et Boké. Almamy Sékou déplore, en revanche, qu’aucun des assaillants n’ait encore été identifié ou arrêté.
Dossiers et argent emportés
Au moment du cambriolage du palais de justice, les forces de défense et de sécurité étaient réquisitionnées pour traquer les fuyards. C’est ce qui aurait fragilisé la sécurité au niveau du tribunal. « Les bandits n’ont forcé que les deux portes des cabinets d’instruction. Ils cherchaient à subtiliser les dossiers criminels et correctionnels pour faire disparaître des preuves ». N’ayant pu ouvrir qu’une seule porte, ils ont forcé le bureau du greffier en chef, auraient relevé des numéros de « certains dossiers sensibles, dérobé un téléphone IPhone et 60 millions de francs guinéens ».
Le procureur annonce l’ouverture d’une enquête. « De la prison à la justice, c’est une suite logique. Ils pensent qu’avec ces dossiers et preuves, ils seront toujours identifiables. Il fallait faire disparaître ces documents pour qu’on n’en parle plus. Ils se trompent. Souvent, nous faisons la photocopie des dossiers et toutes les procédures qui viennent à mon parquet. Les archives des Officiers de police judiciaire gardent une copie. Il est donc facile de reconstruire le dossier ».
Le procureur dit avoir réquisitionné les Brigades anticriminalité, la CMIS et même l’armée, constitué des patrouilles mixtes pour se mettre aux trousses des assaillants, jour et nuit.
Abdoulaye Pellel Bah