Concernant le taux de change, en Guinée, le véritable problème au niveau de la politique de change est celui d’une insuffisance chronique des réserves de change de la BCRG afin de défendre sur les marchés monétaires, la valeur externe de notre monnaie (le taux de change). En effet, à l’image de divers pays depuis la fin effective du système de Bretton Woods en 1973 (accords de Washington), l’adoption du système de change flottant impur par la Guinée exige la détention de réserves de changes. Aussi, l’autre volet de la question des changes en Guinée est celui relatif à l’anarchie dans l’existence des marchés parallèles de changes (Badara Dioubaté, 2007).

En Guinée, la restauration de la valeur extérieure de la monnaie guinéenne qui est le taux de change ne sera effective à moyen et long terme qu’en résolvant le problème de notre déficit commercial structurel. En effet, à l’image de divers pays les moins avancés(PMA), caractérisés par l’existence des déficits jumeaux (budgétaire et commercial) avec une absence ou faiblesse durable du taux de croissance économique (donc de la production), la pression exercée par la demande de devises des opérateurs économiques en contrepartie du Franc Guinéen en vue d’importations massives, fera toujours grimper le niveau du taux de change, en affaiblissant la monnaie nationale dont l’offre est abondante.

Concernant la dernière question soulevée, il est important que la Guinée que notre pays, à travers une BCRG responsable, arrive à respecter les engagements pris. Cependant, comme l’universitaire est neutre, cela ne signifie en aucun cas une prise de position défensive de ma personne à l’égard du projet de la ZMAO; car, à mon humble avis il doit être publiquement discuté en vue d’une identification sérieuse des coûts d’opportunité futurs pour la Guinée sans pour autant commettre la même erreur que nos confrères de l’UEMOA et de la CEMAC car, on a quitté le franc français pour l’Euro sans qu’aucun Etat, aucun parlement ne soit prévenu alors qu’en France cela a fait l’objet d’un grand débat. En s’engageant dans un tel projet, les autorités monétaires renoncent à l’utilisation souveraine de la politique monétaire et de change dans la lutte contre les chocs exogènes.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

L’analyse des statuts la BCRG révèlent que les textes juridiques ne suffisent pas pour asseoir les bases d’une indépendance sans leurs applications rigoureuses. L’objet de la loi bancaire de 1994 était de renforcer l’autonomie de la BCRG. L’Etat s’est servi du principe des avances statutaires de la BCRG pour financer régulièrement son déficit budgétaire[1].

Dans le souci de renforcer l’autonomie de la banque à l’égard de l’Etat, une ordonnance fixant de nouveaux statuts à la BCRG a été promulguée en février 2009. Celle-ci donne une plus grande indépendance de la BCRG au regard des critères d’indépendance légale. Cependant, l’expérience guinéenne révèle que la capacité de l’autorité monétaire à résister aux pressions du gouvernement et à convaincre l’exécutif du bienfondé des objectifs de la politique monétaire est déterminante, pour faire de la BCRG une institution véritablement indépendante (Ahmed Tidiane Diallo, 2010).

La non répercussion des réformes macroéconomiques au niveau microéconomique ne s’assimile pas à une inutilité ou une inefficacité des reformes menées par la Banque Centrale dans le cadre de la conduite de la politique monétaire et de change. En effet, on ne peut pas dire que la Banque Centrale ne joue aucun rôle dans l’économie. Elle assure une bonne régulation qui est tout de même influencée par le comportement de la demande et le faible niveau de développement du secteur privé.

La Banque Centrale doit émettre des bons BCRG, afin de renforcer son indépendance opérationnelle en utilisant ses propres titres comme moyen de régulation de la liquidité bancaire en lieu et place des bons de trésor. Mais jusqu’à présent la BCRG n’a pas fait usage de ce nouvel instrument.

Comme instruments indirects de régulation de la liquidité la BCRG a opté pour le maniement des taux directeurs, l’open market et les réserves obligatoires. S’agissant du taux directeur, le niveau de 12,5 % fixé par la BCRG paraît particulièrement élevé, surtout dans un contexte de ralentissement de l’inflation. Une baisse sensible devrait être envisagée par la Banque Centrale en réduisant par exemple le taux directeur de moitié pour le porter à 6.2 % afin de favoriser la relance des activités économiques des PME.

Par ailleurs il est important dans le cadre de la politique monétaire de donner priorité aux financements des investissements productifs. En effet, l’économie ne trouvera des sentiers d’expansion forte dans des conditions de stabilité des prix sans un meilleur accès des entreprises nationales à des lignes substantielles de crédit pour faire face à leurs énormes besoins d’investissement. Tant il est vrai que la structure des crédits en Guinée montre la place de second rang réservée au financement des investissements productifs et à contrario l’importance des crédits à la consommation.

La Banque Centrale doit continuer à respecter le niveau statutaire des avances (20% des recettes fiscales de l’année t-1) qu’elle est habilitée à accorder au trésor public. Le respect de cette norme contribue à aligner la croissance de la masse monétaire à celle du PIB. Ensuite elle doit réduire la masse monétaire par une politique de résorption des excédents monétaires, par exemple par émission des titres de régulations monétaires.

Ainsi, l’Etat doit poursuivre et généraliser le paiement des salaires des fonctionnaires par virement bancaire. La Banque Centrale et le gouvernement doivent s’assurer que les fonctionnaires disposent des comptes bancaires dans les conditions satisfaisantes mais surtout que les banques commerciales sont capables d’accueillir des nouveaux clients avec un nombre suffisant de distributeurs automatiques de billets afin d’éviter des paniques et des files d’attente interminables devant les banques.

 


[1]Il est fondamental que le trésor public déploie plus d’effort dans la mobilisation et la sécurisation de ces recettes.