Le dossier Oumar Sylla dit Foniké Menguè a connu son épilogue ce jeudi 27 août, au tribunal de première instance de Dixinn. Le juge, Alphonse Charles Wright, a fait son show pendant près de 4 heures, retraçant point par point les étapes de la procédure, de l’enquête préliminaire aux plaidoiries des conseils du prévenu. Il prend sur lui la courageuse et peut-être historique décision de déclarer le responsable antennes et mobilisation du FNDC non coupable des faits qui lui sont reprochés. Il justifie sa décision par le fait, selon lui, que les accusations de communication et de divulgation de fausses informations ne colleraient en rien avec l’article 519 du Code pénal, article sur lequel le mystère public avait fondé son accusation. Même chose pour ce qui concerne les accusations de menaces, notamment de violence ou de mort par la mise à disposition d’autrui d’informations de nature à troubler la sécurité publique.
Il explique que le mystère public n’a pas été en mesure de prouver que les publications de l’activiste sur les réseaux sociaux sont de nature à troubler la sécurité publique :
« Attendu que l’interprétation des propos du prévenu pose des problèmes à savoir : l’identification des victimes au préjudice desquels les menaces ont été proférées…, attendu que ces propos doivent être interprétés dans leur sens réel ou contextuel, que le juge doit apprécier les menaces à travers les moyens utilisés, attendu que le contenu des propos ne peut pas être retenu comme menaçant au regard du contexte sociopolitique dans lequel les citoyens sont fondés d’exprimer librement leur opinion, que le prévenu a expliqué les raisons de son opposition au 3e mandat…, le tribunal déclare Oumar Sylla dit Foniké Menguè non coupable de ces faits, le revoie des fins de la poursuite pour des délits non constitués. Le tribunal ordonne qu’il soit mis en liberté immédiatement s’il n’est détenu pour autre chose, ordonnons en outre la restitution de ses téléphones ».
La décision sonne comme un véritable camouflet pour le pro-crieur de la roue-publique de Dixinn, prompt à bondir sur les opposants au 3e mandat. Sidy Souleymane N’Diaye a désespérément annoncé à quelques journaleux qu’il « relève appel ». Mais sûrement pas avec la même énergie qu’il utilisait au moment d’enfoncer Oumar Sylla, de requérir 2 ans d’emprisonnement et 30 millions d’amende. Le pro-crieur disait lui-même qu’il tenait Foniké Menguè de ses deux mains et que ce dernier n’avait aucun moyen d’échapper à une condamnation. C’est pourtant, le contraire qui se produit.
Foniké Menguè savoure certes sa libération, mais jure qu’il va se remettre rapidement au travail et lutter contre le 3e mandat : « C’est un sentiment de satisfaction ; aujourd’hui, c’est une victoire du peuple de Guinée. C’est une grande victoire de la vérité contre le mensonge, de la justice contre l’injustice. Une victoire du bien contre le mal. Nous allons continuer le combat. Dès demain, je serai sur le terrain pour remobiliser la troupe afin de continuer le combat jusqu’à la victoire finale ». Ses avocats abondent pratiquement dans le même sens. L’ancien bâtonnier, Me Mohamed Traoré, félicite le juge pour son courage : « Dès le début, nous avons dit que c’était une arrestation et une détention illégales. Le juge, Alphonse Charles Whrit, vient de se ranger de notre côté, en reprenant à peu près toutes les argumentations qu’on a développées. C’est une décision qu’il faut saluer, c’est pourquoi nous disons souvent que lorsqu’il faut parler de la justice guinéenne, il ne faut pas généraliser. Il y a des magistrats qui restent conformes à leur sermon. Ce juge vient de le démontrer. Nous savons qu’il a été soumis à pas mal de pressions et qu’il a dû résister. C’est cela, un juge. En réalité, la détention de Foniké s’inscrivait dans une logique bien simple, faire taire tous ceux qui ne sont pas favorables au projet de 3e mandat. Nous nous battrons pour que les procès de toutes les personnes arrêtées dans ce cadre se tiennent dans les meilleurs délais ».
Yacine Diallo